A Madagascar, les migrations internes vers la capitale sont une tendance lourde, qui s’est accélérée au cours des 5 dernières années. Pour faire face à cette nouvelle donne, la commune urbaine d’Antananarivo adapte ses politiques sociales et urbaines. La capitale sera d’ailleurs considérée comme l’une des villes pilotes par l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), pour le travail effectué, comme l’application « Tongasoa eto Iarivo » (« bienvenue à Tana »).
Une migration galopante dans la capitale
A Madagascar, la gestion des flux migratoires internes est un défi de taille pour la capitale. Dépassée par l’arrivée de nouveaux habitants venant des campagnes, depuis plusieurs années, Antananarivo s’est transformée en une ville surpeuplée qui peine à faire face aux impacts de ces migrations dues principalement à un déséquilibre du développement économique sur le territoire. Ils seraient plus d’un million à avoir rallié la capitale ces 10 dernières années, dans l’espoir de meilleures conditions de vie.
Pour mieux comprendre et analyser les tenants et aboutissants du phénomènes, une étude de diagnostic migratoire du territoire a été réalisée. Ny Andraina Andriamanantena, socio-économiste chez Coef Ressources, qui a piloté cette étude, explique : « On s’est rendus compte que contrairement aux idées reçues, 80% des migrants viennent des Hautes-Terres et non du Sud, par exemple, que c’était une population très jeune avec trois-quarts d’entre eux qui ont entre 15 et 25 ans. Et surtout, on observe que 58% des migrants sont arrivés il y a moins de cinq ans. Donc, on peut dire qu’on assiste à une explosion migratoire récente. »
Confrontée aux défis d’une migration rurale en pleine expansion depuis cinq ans, Antananarivo n’a pas les ressources pour offrir aux nouveaux arrivants une vie décente. La capitale et sa banlieue qui n’ont pas été conçues pour supporter une telle urbanisation, comptent aujourd’hui plus de 3 millions d’habitants. Et le manque d’emplois a quant à lui a entraîné une concentration de la pauvreté.
La démarche de la Commune Urbaine d’Antananarivo (CUA) et le soutien de l’OIM
Depuis décembre 2020, la Commune urbaine d’Antananarivo et l’Organisation Internationale des Migrations ont engagé un partenariat autour du projet « Intégration de la migration dans le développement urbain durable et inclusif à Antananarivo ».
Recenser les migrants, connaitre les raisons de leur déplacement et leur permettre de mieux s’intégrer, c’est une première étape que veut mettre en place la Commune urbaine d’Antananarivo. C’est à cet effet qu’elle a créé l’application « Tongasoa eto Iarivo » (« bienvenue à Tana ») dont l’objectif est de mener des recherches, d’enregistrer les nouveaux arrivants et de pouvoir publier les statistiques liées à l’immigration à Antananarivo.
« Des statistiques à jour sont un début pour que nous puissions voir où nous en sommes et qui se déplace où. Quand nous parlons de migrations, il est aussi important de comprendre quels sont les facteurs qui attirent les gens vers un lieu et les facteurs qui les repoussent d’un lieu. Ce que je constate, c’est que le principal moteur des mouvements de population dans ce pays, ce sont les inégalités », fait savoir Ashraf El Nour, directeur régional de l’OIM pour l’Afrique australe, en visite dans la capitale malgache.
Marchands de rue de plus en plus nombreux, multiplication des bidonvilles, jeunes dans l’économie informelle… alors que le centre d’Antananarivo suffoque, l’une des pistes discutées par la CUA avec l’Organisation internationale pour les migrations est de relocaliser les infrastructures comme les marchés, en périphérie. « Nous essayons de quantifier et de qualifier les maux que nous avons par rapport à un flux qui devient de plus en plus important. La ville a été conçue pour 400000 habitants. Aujourd’hui, dans ses 90 km2, elle est presque envahie. On n’a presque plus de terrains pour construire des infrastructures communautaires. Si c’est le commerce qui est le plus important à l’intérieur de la ville, il va falloir bouger cela dans les pourtours de la ville. Il en est certainement de même pour les centres universitaires et les hôpitaux afin qu’il y ait, justement, distribution de richesses et qu’il y ait un peu plus d’équilibre au niveau démographique », explique Elia Ravelomanantsoa, Directrice des Arts, de la Culture et de la vie communautaire au sein de la Commune urbaine d’Antananarivo.