Afin de soutenir la création et le développement des activités par les femmes, la municipalité d’arrondissement de Garoua 2 développe une démarche originale qui s’appuie sur la création d’Associations de Femmes pour l’Epargne et le Crédit. Au-delà de la dynamisation de l’économie locale, ce programme permet de renforcer la citoyenneté et d’aborder avec les femmes des enjeux socio-culturels.
Une démarche participative et une volonté forte de l’exécutif local
Ce projet est né d’un vaste processus participatif conduit par la Commune de Garoua (IIe arrondissement) et de la volonté de l’autorité locale de soutenir l’autonomisation des femmes et leur contribution au développement économique local.
En 2015, au terme d’une campagne de sensibilisation d’une durée de trois mois, menée par les conseillers municipaux et le service social de la commune auprès de la population féminine, mais aussi des autorités traditionnelles, religieuses, des leaders d’opinion, sur les potentialités socio-économiques de la femme, certaines difficultés ont été relevées pour le lancement d’un processus d’envergure, notamment :
- Des difficultés relatives à l’adhésion des hommes, car certains d’entre eux craignent de perdre leur autorité (titre de chef de famille) si leurs femmes sont économiquement autonomes.
- Du coté des femmes, certaines d’entre elles éprouvent une certaine réticence à se prendre en charge en tant qu’acteur du développement.
Pour pallier aux inquiétudes liées à ces problèmes constatés, la Mairie et son maitre d’œuvre, association locale de développement communautaire, ont mis en œuvre des groupes de réflexion sur l’importance de l’éducation pour tous, et notamment les femmes, pour le développement.
A l’issue de cette campagne, les premières associations d’épargne et de crédit ont été créées. Après un an de travail 60 AFEC avait déjà pu être créées et étaient opérationnelles, en montrant tout l’engouement des femmes pour participer au processus et le potentiel de cette démarche.
Une priorisation des enjeux locaux et la construction d’un partenariat avec l’AIMF
Le Maire, convaincu de l’urgence de faire face aux enjeux d’autonomisation des femmes comme clés d’un meilleur développement humain et de développement local, a soumis cette thématique de travail à l’AIMF pour appui et cofinancement.
Le projet soutenu par la Mairie et l’AIMF a été structuré selon deux phases dont la première s’est réalisée entre 2016 et 2017. Lors de la Phase 1, l’objectif de créer les premières 100 AFEC a été atteint. Ces structures étaient déjà fonctionnelles de manière efficiente à fin 2017.
Le dispositif d’accompagnement, conçu par la Commune en partenariat avec l’ONG camerounaise FAVIDA, intègre les formations et les sensibilisations : à l’épargne et au crédit pour la mise en œuvre d’activités génératrices de revenus ; à la vie associative ; au leadership féminin ; aux droits des femmes (accès au foncier, lutte contre les violences, scolarisation des jeunes filles …) ; à la gestion durable des ressources naturelles.
Une base SIG a été créée et testée dès 2016. Outil de collecte et de traitement des données des associations, la base des données est conçue aussi comme aide à la décision : en suivant les performances financières et organisationnelles des AFEC, ainsi que leur distribution sur le territoire de la commune, le SIG donne des indications pertinentes pour concentrer les efforts de la mairie et du maitre d’œuvre là où le besoin est plus manifeste. Par ailleurs, cet outil permet d’avoir une vision d’ensemble sur le projet et des principaux indicateurs.
La deuxième phase, basée sur la même méthode a démarré en juillet 2018 avec comme objectifs affichés la création de 100 AFEC supplémentaires et la création d’une faitière, – fédération des réseaux d’associations ; l’opérationnalisation de la coopérative d’Epargne et de Crédit ; le montage et le cofinancement de micro-projets des AFEC. Du point de vue financier, l’objectif de la mobilisation de 390 000 000 fcfa était poursuivi.
Les résultats et les impacts
A la fin du projet (fin 2019), force est de constater l’engouement des femmes pour participer à cette dynamique, ainsi que le dépassement des objectifs escomptés.
267 AFEC sont désormais créées et comptent plus 8 000 membres qui ont été formées et sensibilisées sur une période de 4 ans et réparties dans 52 sur 56 quartiers que compte la Commune.
Sur les 500 000 000 FCFA (762 245 €) épargnés par les AFEC, 450 000 000 CFA (686 020 €) ont été redistribués aux membres sous forme de crédit à partir des fonds épargnés pour la création des activités génératrices des revenus.
27 filières ont pu être identifiées, ce qui permet de monitorer les secteurs économiques qui ont le plus de poids pour les AFEC. Selon leur répartition spatiale et thématique : on estime en moyenne 32% dans l’agriculture, 55% dans le petit commerce, 10% dans l’élevage et 3% dans la couture.
Par ailleurs, 80 000 000 CFA ont été mobilisés par les AFEC en fonds de solidarité, venant conforter la valeur culturelle et sociale de ces regroupements féminins. Les domaines d’utilisation étant principalement les soins de santé, les frais d’éducation des enfants et les frais liés aux baptêmes, mariages ou décès d’un membre sous forme de don de solidarité.
Enfin, du point de vue de la structuration du tissu local, 22 réseaux et une fédération des réseaux d’associations ont été créés et structurés et une Coopérative d’Epargne et de Crédit est en gestation.
L’initiative a remporté récemment le 1er prix du Concours National organisé par le Fonds Spécial d’Equipement et d’Intervention Intercommunale (FEICOM) avec l’appui de l’ONG HABITAT des meilleures pratiques communales de développement local édition 2019.
Ce prix d’un montant de 76.000€ sera utilisé pour renforcer les caisses des AFEC afin de booster leurs fonds de roulements dans la réalisation des leurs AGR et le suivi pour une pérennisation du projet.
Budget : 175 000 €, dont 20% apporté en cofinancement direct par la Commune
Mise en œuvre : 2018 – 2019 (phase 2)
Partenaires : AIMF – Commune de Garoua II